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Fourest,
Georges

Portrait gravé
de Georges Fourest par Jeanne Picq
------Georges
Fourest est né à Limoges le 6 avril 1864, place Denis Dussoubs,
dans un immeuble familial où son grand-père maternel exerçait
la profession d'apothicaire. Les parents de Georges Fourest déménagent
ensuite 11 rue Turgot, où ils vivent de confortables rentes. La
famille Fourest partage son temps entre Limoges et la propriété
campagnarde de " Gentaud ", dans la commune de Saint-Paul, à
quelques kilomètres de Limoges.
Après des études secondaires au Lycée Gay-Lussac
de Limoges, Georges Fourest accomplit des études de droit à
la Faculté de Droit de Toulouse. C'est là qu'il noue plusieurs
amitiés avec de jeunes apprentis-écrivains (comme Ernest
Dufour et Laurent Savigny) et, surtout,
qu'il fait en 1887 la rencontre décisive d'un aîné,
Laurent Tailhade, qui est alors âgé
de trente-trois ans et qui, sous la pression familiale, est contraint
de reprendre des études de droit interrompues en 1880.
A
l'époque, Fourest a déjà commis quelques essais littéraires,
vraisemblablement des poèmes de facture strictement parnassienne
qu'il signe Georges Louyat - Louyat en référence
à un quartier de Limoges. Il reniera par la suite cette production.
En 1889, il quitte Toulouse afin de poursuivre ses études à
Paris, où il commence à fréquenter la bohème
littéraire du Quartier Latin et de Montmartre. Il retrouve Laurent
Tailhade qui a repris le chemin de la capitale l'année précédente
et qui, pour sa part, a renoncé à terminer ses études.
Laurent
Tailhade joue un rôle de mentor auprès de Fourest
et facilite sa - modeste mais véritable - entrée sur la
scène littéraire. En particulier, il introduit Fourest au
Décadent d'Anatole
Baju. En février 1889, Fourest y publie " Le doigt
de Dieu ", texte repris plus tard dans son recueil La
négresse blonde. Fourest y donnera encore une étrange
pièce " Amertumes undécimales ", jamais reproduite
en recueil, ainsi qu'un " Quatorzain pour aller à Bicêtre
", signé du pseudonyme, inventé par Tailhade, Mitrophane
Crapoussin, mais qui est en fait le " Pseudo-sonnet plus spécialement
truculent et allégorique ", que l'auteur publiera ultérieurement
sous ce titre et avec sa propre signature dans la revue
L'Ermitage, avant de le faire figurer dans La négresse
blonde.
En 1892 s'interrompent l'amitié entre Fourest et Tailhade
et les échanges épistolaires entre les deux poètes.
Sans doute l'influence trop perceptible des poèmes de Tailhade
- du moins ceux de la veine " aristophanesque " - sur ceux de
Fourest a-t-elle fini par agacer l'auteur d'Au pays du
mufle.
Après la disparition du Décadent en
avril 1889, Fourest prend part, en 1890, à la naissance de L'Ermitage,
revue dirigée par Henri Mazel. Il
fournit régulièrement la revue en poèmes jusqu'au
retrait d'Henri Mazel en 1897. Il y présente
également deux contes, " La profession d'Eusèbe Frottemouillard
" et " Alba ", qui figureront parmi les Contes
pour les satyres. Il collabore plus sporadiquement à La
Plume de Léon Deschamps, au
Procope, à La Province Nouvelle
d'Auxerre
D'autre part, il continue de fréquenter les soirées
et les cabarets littéraires. C'est, selon Willy,
lors d'une soirée de La Plume qu'il est acclamé
après avoir récité son " Epître falote
et testamentaire pour régler l'ordre et la marche de mes funérailles
".
Il
est possible que Fourest se soit rendu quelquefois au Chat Noir ; par
l'entremise de Willy qui en était
devenu le directeur, il a pu placer deux poèmes dans les derniers
numéros du journal éponyme - en 1897, donc.
Dès 1890, Georges Fourest songe à publier au moins une plaquette
de poèmes. Lors de sa première collaboration à L'Ermitage,
Le geste philistin est annoncé en " préparation ".
En 1898 dans La Plume, c'est une Chanson falote,
titre plus laforguien que tailhadesque, qui est signalée "
à paraître prochainement ". Il faut cependant attendre
1909 pour que paraisse La négresse blonde,
à compte d'auteur, chez Albert Messein.
En 1908, Georges Fourest semble vouloir adopter un mode de vie plus rangé
(il a quarante-quatre ans !) et il se marie avec une pianiste. Une fille,
Suzanne, naît en 1909, et un fils,
Henry Pierre, en 1911. Georges Fourest n'exerce
pas - ou guère - sa profession de juriste. Il se consacre à
la gestion des biens familiaux, à la vie de famille et, tant soit
peu, à la littérature. Sa Négresse
blonde est plutôt bien accueillie. Le livre s'est rapidement
vendu et a été commenté dans la presse littéraire
de l'époque. Il connaît une nouvelle édition (revue
et augmentée) chez Crès en
1911, ainsi que trois éditions successives en 1920 et 1922 à
La Connaissance.
C'est en 1918 que Georges Fourest a rencontré René-Louis
Doyon, responsable de la revue et des éditions
La Connaissance. Leur première collaboration est à
la limite du canular. Il s'agit d'une plaquette intitulée Douze
épigrammes plaisantes imitées de P.-V.
Martial, chevalier romain, par un humaniste facétieux. L'ouvrage
ne porte pas de nom d'auteur ni d'indication d'édition, si ce n'est
celle-ci, qui prolonge la fantaisie de l'uvre : " Tiré/
à deux cents exemplaires numérotés/ sur les presses
de Flavius Niger et Cie/ imprimeurs jurés/ 69, rue du Satyre-Farfelu,
69/ à Phalopolis-en-Lanternois/ Anno Domini MCMXX ". Outre
la notation " Flavius Niger " (" nègre blond ")
et le style alambiqué typiquement fourestien de la " Prémonition
dédicatoire " qui précède les poèmes,
des lettres sur les " Martialeries " entre le poète et
René-Louis Doyon prouvent que cet étonnant petit livre est
bien de Georges Fourest. En réalité, le canular serait double
: en effet, une recherche en cours tend à montrer que les poèmes
ne sont pas des imitations mais de véritables traductions en vers
d'épigrammes de Martial.
En 1923, Georges Fourest publie les Contes pour les satyres
chez Messein. Par la suite il fréquente
en voisin la librairie de José Corti,
située alors sur la rive droite de la Seine, rue de Clichy, dans
le IXe arrondissement. José Corti publie
le deuxième livre - officiel - de poèmes de Fourest, Le
géranium ovipare, en 1938, dont il aurait suggéré
le titre, et il réédite continûment tant La
négresse blonde que les Contes pour les satyres.
Georges Fourest est mort à Paris, 24 rue de Milan, dans le IXe
arrondissement, le 25 janvier 1945. Il est enterré au cimetière
du Père Lachaise.
Bibliographie
1. uvres de Georges Fourest
1.1. Recueils
Les rééditions
des uvres de Georges Fourest sont loin d'être rares - il y
eut même un Livre de Poche en 1964 ; et La négresse blonde
et Le géranium ovipare sont toujours disponibles dans " Les
cahiers rouges ", chez Grasset. Sont reprises ici les éditions
accessibles chez José Corti, en mentionnant la date de la première
édition et le nom du premier éditeur, auxquelles sont ajoutés
les " Martialeries " ainsi qu'un volume paru chez Kra en 1930
et qui comporte en " Appendice " un choix d'extraits de critiques.
La négresse blonde, Paris, José Corti, 1997. Première
édition Messein, 1909. Septième édition Editions
Kra, 1930.
Douze épigrammes plaisantes imitées de P.-V. Martial, chevalier
romain, par un humaniste facétieux, Paris, La Connaissance, 1920.
Contes pour les satyres, Paris, José Corti, 2004. Première
édition Messein, 1923.
Le géranium ovipare, Paris, José Corti, 1993. Première
édition José Corti, 1938.
1.2. Textes
publiés en revues :
" Le doigt
de Dieu " in Le Décadent n°29, 15-28 février 1889.
" Amertumes undécimales " in Le Décadent n°33,
15-30 avril 1889.
" Deux Ballades " in L'Ermitage n°2, vol.1, mai 1890, pp.
77-79.
" Quatorzain gris ", in L'Ermitage n°4, vol.1, juillet-décembre
1890, pp. 154-155.
" Ballade en l'honneur de la famille Trouloyaux " in L'Ermitage
vol.1, juillet-décembre 1890, pp. 155-156.
" Ballade ", in L'Ermitage n°1, vol. 2, janvier 1891, p.
32.
" Les jardins ", in L'Ermitage n°5, vol. 2, mai 1891.
" Trois poèmes coppéistes ", in L'Ermitage n°7,
vol. 3, juillet 1891, pp. 430-431.
" Pseudo-sonnet ", in L'Ermitage n°8, vol. 3, août
1891, p. 479.
" Pour cueillir les narcisses ", in L'Ermitage n°9, vol.
3, septembre 1891, p. 524.
" A la Vénus de Milo ", in L'Ermitage n°11, vol.
3, novembre 1891, p.668.
" Ballade en l'honneur des poètes falots ", in L'Ermitage
vol. 4, janvier-juin 1892, pp. 23-24.
" Epître testamentaire ", in L'Ermitage vol. 4, janvier-juin
1892, pp. 222-224.
" Sardines à l'huile ", in L'Ermitage vol. 5, juillet-décembre
1892, pp. 38-39.
" La profession d'Eusèbe Frottemouillard ", in L'Ermitage
vol. 5, juillet-décembre 1892, pp. 216-219.
" Brelan de pseudo-sonnets ", in L'Ermitage vol. 6, janvier-juin
1893, pp. 184-185.
" Petits lapons ", in L'Ermitage vol. 7, juillet-décembre
1893, p. 284.
" La négresse blonde ", in L'Ermitage vol. 9, juillet-décembre
1894, pp. 14-17.
" Epître falote et balnéaire ", in L'Ermitage vol.
9, juillet-décembre 1894, pp. 228-230.
" Autopianiste limosin ", in Le Procope n°1 (3e année),
janvier 1895, p. 2.
" Le vieux saint ", in L'Ermitage vol. 11, juillet-décembre
1895, pp. 145-146.
" Ballade des petits gommeux limousins ", in La Plume n°137-160,
1895, pp. 386-387.
" Alba ", in L'Ermitage vol. 13, juillet-décembre 1896,
pp. 29-33.
" Repas de famille ", in La Province Nouvelle, Auxerre, mars
1897.
" Pseudo-sonnet asiatique et littéraire ", in La Province
Nouvelle, Auxerre, juillet 1897.
" Renoncement " in La Plume : revue littéraire et artistique
bimensuelle n°9, 1898, p. 101.
" Le Loup garou " in La Connaissance n°4, avril 1920, pp.
357-363.
" Alba ou les parturitions d'une jeune malthusienne " in La
Connaissance n°7, juillet 1920, pp. 609-615.
" Le Tombeau vivant " in La Connaissance n°23, mars 1922,
pp. 1033-1037.
1.3. Préfaces :
" Préface
" in Le MOYNE A.-Yves, Les Antidotes fanfreluchés, resveries
en plusieurs tableaux, Paris, Crès, 1914.
" Préface " in HELLE Robert Guy d', Poèmes actinimorphes,
Rodez, L'Aube, 1934.
" Lettre-préface adressée à Mme Délia-Pierre
Halary ", in VIRGILE, Les Bucoliques, Paris, Lemerre, 1936. Traduction
en vers de Pierre Halary.
" Préface " in CARRE Julien-Albert, Sèves, Paris,
La Caravelle, 1937.
1.4. Textes
de Georges Fourest signés Mitrophane Crapoussin :
" Renoncement
" in Le Décadent n°30, 1-15 mars 1889 (texte non repris
en recueil et probablement composé en collaboration par Georges
Fourest et Laurent Tailhade - voir Picq, 2001: 251).
" Quatorzain pour aller à Bicêtre " in Le Décadent
n°30, 1-15 mars 1889 (repris et signé Georges Fourest dans
L'Ermitage n°8 puis dans La négresse blonde respectivement
sous les titres " Pseudo-sonnet " et " Pseudo-sonnet plus
spécialement truculent et allégorique ").
1.5. Texte
de Georges Fourest signé Georges Louyat :
" Quand parut
le matin
" cité par Joseph Savary dans son article "
Georges Fourest ", in La Province Nouvelle, Auxerre, mai 1897, pp.
81-88.
2. Quelques
articles sur Georges Fourest
Les études
approfondies sur Fourest sont rarissimes. Sont également repris
ici quelques ouvrages qui, tout en portant sur un autre auteur ou sur
un autre sujet, évoquent incidemment Georges Fourest.
- Les poètes
du Chat Noir, Paris, Gallimard, coll. " Poésie/Gallimard
", 1996.
- CARADEC François,
Feu Willy avec et sans Colette, Paris, Jean-Jacques Pauvert/Carrère,
1984, passim.
- CORTI José,
Souvenirs désordonnés (
- 1965), 10/18, coll. "
Domaine français ", 2003 (José Corti, 1983), passim.
- DELBOURG Patrice,
" Georges Fourest, bateleur ovipare " in Les désemparés.
53 portraits d'écrivain, Pantin, Le Castor Astral, 1996, pp.
35-38.
- DUSSERT Eric,
" Editer la Négresse. Correspondance croisée René-Louis
Doyon/Georges Fourest " in Histoires littéraires n°1,
janvier 2000.
- GENETTE Gérard,
Palimpsestes. La littérature au second degré, Paris, Le
Seuil, coll. " Points/Essais ", 1992 (première éd.
1982), pp. 89-91.
- PIA Pascal,
Les livres de l'enfer, Paris, Fayard, 1999, pp. 217-218.
- PICQ Gilles,
Laurent Tailhade ou De la provocation considérée comme
un art de vivre, Paris, Maisonneuve & Larose, coll. " Les champs
de la liberté ", 2001, passim.
- RODIEK Christoph,
" Georges Fourest : Le Cid. Eine Klassikerpersiflage " in
Steinbach Marion, Risse Dorothee, La poésie est dans la vie :
Flanerie durch die Lyrik beiderseits des Rheins, Bonn, Romanisticher,
Abhaudlungen zur Sprache und Literatur, 2000, pp. 77-87.
- SAVARY Joseph,
" Georges Fourest ", in La Province Nouvelle, Auxerre, mai
1897, pp. 81-88.
- WILLY, "
Préface ", in Georges Fourest, La négresse blonde,
Paris, José Corti, 1997, pp. 7-14. Première édition
Messein, 1909.
©Laurent
Robert
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