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Dolent, Jean



Photographie de Jean Dolent parue dans Je Sais Tout d'octobre 1909

 
-----Ecrivain et critique d'art français (Paris 5 juin 1835 - Paris 31 août 1909) de son vrai nom Charles Antoine Fournier. Issu d'une famille ouvrière installée à Belleville, Jean Dolent débute dans le journalisme en 1861 comme rédacteur en chef du Gaulois, petite gazette satirique républicaine. Il publie l'année suivante son premier livre, Une Volée de merles, recueil de portraits charges dans lequel il s'attaque aux tenants de la critique parisienne (Sainte-Beuve, Théophile Gautier, Paul de Saint Victor…). Viennent ensuite deux romans écrits dans la fascination de Sterne et Cervantès, Le Roman de la chair (1866) et L'Insoumis (1871), suivi d'Avant le déluge (1871), recueil de ses textes politiques publiés dans La Démocratie entre 1868 et 1869 dans lequel il insère son premier compte-rendu du Salon réalisé en 1869 pour Le National.

---- Déçu dans ses rêves de gloire littéraire et ses aspirations républicaines au lendemain de la Commune, Dolent se retire de la scène littéraire pour se consacrer uniquement à la rédaction de livres sur l'art contemporain dont les titres sont aussi déroutants que leurs contenus. Encouragé dans cette voie nouvelle par Alphonse Lemerre, il publie en 1874 et 1877 Le Petit Manuel d'art à l'usage des ignorants et Le Livre d'art des femmes. La reconnaissance vient enfin en 1888 lorsqu'il fait paraître Amoureux d'art, ouvrage dans lequel il s'affirme au seuil du symbolisme comme défenseur de l'art de Carrière, Rodin, Puvis de Chavannes et Redon. Dès lors, il continue sur sa lancée avec Monstres (1896), Maître de sa joie (1902) et enfin Le Cyclone (1907). Dans ce dernier ouvrage édité à 170 exemplaires, Dolent dresse alors le bilan définitif de sa carrière de critique d'art en imaginant le musée du Luxembourg ravagé par une tempête providentielle qui ne laisse à la postérité que les œuvres dignes de rentrer au Louvre, en l'occurrence celles de Carrière, Puvis, Moreau, Monet, Degas, Cézanne… au détriment de celles de Bouguereau, Cabanel ou Bonnat impitoyablement crevées.



Portrait de Jean Dolent par Bracquemond in " Amoureux d'art ", 1888.

----Dolent refuse le titre de critique professionnel et a toujours fièrement revendiqué son indépendance. Employé aux contentieux d'une maison de change pendant cinquante trois ans, il pratique l'exercice critique en amateur éclairé et passionné. Sa production, goûtée par une mince frange de ses contemporains, est délibérément confidentielle et se disperse dans une myriade de petites revues. Après avoir collaboré au Journal des artistes (1883-1894) et à La Revue contemporaine pour laquelle il signe les comptes-rendus des Salons de 1885 et 1886, Dolent fait apparaître sporadiquement sa signature dans les pages du Mercure de France, de La Vogue, La Plume, L'Ermitage, les Essais d'art libre, L'Idée Libre, l'Humanité nouvelle ou encore dans les Annales de la jeunesse laïque qui publie en 1903 son dernier Salon.

---- Ami de Carrière, Rodin, Gauguin, Redon, Bracquemond, Fantin-Latour et Ribot, Dolent est très apprécié des artistes indépendants tant pour la subtilité et le laconisme de sa prose que pour ses prises de position en faveur de la défense de la modernité. Refusant le débat sur la place publique et préférant vivre retiré en son lointain Belleville, Dolent peut aussi sortir de sa réserve pour défendre Gauguin entre deux voyages ou Rodin pendant l'affaire du Balzac. En outre, il est aussi le fondateur en 1874 des " Dîners des Têtes de bois ", société littéraire et artistique qu'il présida jusqu'à la fin des années 1890 et dont les comptes-rendus de soirées étaient publiés dans Le Journal des artistes et Le Mercure de France. Mais c'est surtout dans le calme de sa maison de Belleville, entouré des objets de sa collection notamment le Portrait de Verlaine par Carrière (1891, musée d'Orsay) que Dolent préfère se tenir avec ses amis artistes dont il rapporte les conversations dans ses livres. Sa demeure, la Villa Ottoz, devient ainsi dans les années 1890 un des plus importants salons artistiques dans lequel se rencontrent les meilleurs représentants de la critique symboliste (Gustave Geffroy, Roger Marx, Charles Morice, Gustave Kahn, Julien Leclercq…). À juste titre, Mauclair surnommera Dolent le " Mallarmé de Belleville ".

© Pierre Pinchon


Œuvres

Une volée de merles, Paris, E. Dentu, 1862, In-18, 211 p.
Cote BnF : Z- 47234

Une volée de merles, 2e édition, Paris, Cournol, 1863, In-18, 211 p.,
Cote BnF : Z- 47235

Le roman de la chair, 100 dessins par Hadol, Paris, F. Cournol, 1866, 312 p., in-16
Cote BnF : Y2- 27983

Merci, prologue d'ouverture, dit au théâtre de Belleville le 12 octobre 1868, Paris, imprimerie Wittersheim, 1868, In-8 °
Cote Arsenal : GD- 46313

L'insoumis, roman, eau-forte par Eugène Millet, suite du Roman de la chair,
Paris, Cournol, 1871, 215 p., in-12
Cote BnF : Y2- 27982

Avant le déluge, Paris, Cournol, 1871, In-12, 130 p.,
Cote BnF : Z- 47233

Petit manuel d'art à l'usage des ignorants. La peinture. La sculpture, Paris, A. Lemerre, 1874, In-12, 223 p.
Cote BnF : V- 36853

Le Livre d'art des femmes. Peinture, sculpture, eau-forte par Ribot, Paris, A. Lemerre, 1877, In-12, IV-228 p.
Cote BnF : MFICHE 8- V- 16828

La Parade des joueurs, Paris, A. Lemerre, 1883, In-8 ° , 16 p.
Cote BnF : 8- YF PIECE- 15

La Parade de la dette, Paris, imprimerie de Bellenand, 1885, In-8 ° , 16 p.
Cote BnF : 8- YF PIECE- 34

Amoureux d'art, Paris, A. Lemerre, 1888, In-12, 242 p., eau-forte par Eugène Carrière, portrait gravé par Bracquemond
Cote BnF : 8- V- 20368

Monstres, lithographies par Eugène Carrière, Paris, A. Lemerre, 1896, 199 p.
Cote BnF : 8- Z- 14453

Georges Denoinville, (Georges Besnus, dit). Sensations d'art. Préface de Jean Dolent. Lithographie d'Eugène Carrière, E. Girard, 1898, In-16, XIV-150 p.
Cote BnF : 8- V- 26705

Façons d'exprimer, Paris, Maison des poètes, 1900, In-16, 58 p.
Cote BnF : 8- Z- 15308

Maître de sa joie, Paris, A. Lemerre, 1902, 219 p., in-12
Cote Gallica : NUMM- 99849

Le Cyclone. Crevés ! éraflés ! sauvés ! le déjeuner du cyclone ; au retour. Paris, Maison des poètes, 1907, In-12, 75 p.
Cote BnF : 8- V- 31825

Pages choisies de Jean Dolent, 1835-1909. Introduction, par Charles Morice. Paris, A. Messein, 1913. In-18, XLV-48 p.
Cote BnF : 8- Z- 21595

Aurel. Jean Dolent l'Adorable et les plus belles lettres de Dolent à Aurel. Biographie, par Alfred Mortier. Paris, Éditions de la Revue moderne des arts et de la vie, 1946. In-16,
180 p.
Cote BnF : MFICHE 16- Z- 1299